A travers la figure d’Edward Bernays, neveu méconnu de Freud et théoricien du marketing moderne, le documentariste Jimmy Leipold retrace l’émergence des méthodes de persuasion de masse.
Comment vendre plus de bacon aux Américains ? Comment doubler les bénéfices des cigarettiers ? Comment renverser un pouvoir en place ? Un jeu d’enfant pour le publicitaire Edward Bernays, père des relations publiques modernes. Le documentaire de Jimmy Leipold retrace l’entreprise de ce théoricien, neveu de Freud, peu connu du grand public, bien que ses méthodes imbibent le marketing aujourd’hui encore.
Partant du principe énoncé par Thomas Jefferson dans la Déclaration d’indépendance américaine que « le juste pouvoir [des hommes] émane du consentement des gouvernés », Edward Bernays définit, près de deux cents ans plus tard, les relations publiques comme « la fabrication du consentement ». Et pour cela, il a des recettes. S’appuyer sur les « leaders d’opinion », par exemple. Le président Wilson a promis en 1916 que les Etats-Unis n’entreraient pas en guerre ? Le jeune Bernays et la commission Creel, composée de journalistes et de publicitaires, vont promouvoir celle-ci en mobilisant l’industrie du divertissement et des acteurs tels que Charlie Chaplin et Douglas Fairbanks. Des milliers d’Américains acceptent alors de s’enrôler.
Au service des intérêts privés
De réussites en coups d’éclat, le documentaire fait apparaître les rouages de la « manipulation des masses » utilisée par l’élite de l’époque, en pleine révolution industrielle, guidée par l’idée fraîchement théorisée qu’il faut, pour convaincre, s’adresser aux émotions et à l’instinct des foules. Double neveu de Sigmund Freud (par son père comme par sa mère), Edward Bernays se passionne pour la psychologie sociale et la toute récente psychanalyse, imagine les applications de ces disciplines et les met au service des intérêts privés. Il aide ainsi les industriels de l’époque à imposer l’idéologie capitaliste comme indissociable du « rêve américain », face à une classe ouvrière en quête de droits et au président Franklin D. Roosevelt, dont le New Deal est jugé interventionniste. Historien, sociologue, spécialistes des relations publiques ainsi que le linguiste Noam Chomsky et le reporter Chris Hedges viennent contextualiser l’émergence de cette mécanique.
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Ce documentaire est diffusé dans le cadre d’une soirée « Thema », avec Propagande, l’art de vendre des mensonges de Larry Weinstein, vaste panorama de la manipulation des foules à travers le temps et Iran-Irak, la guerre par l’image, documentaire inédit de Maryam Ebrahimi, sur la place de la photographie dans la propagande de guerre.
« Propaganda, la fabrique du consentement », documentaire de Jimmy Leipold, France, 2017, 53 min, Arte.tv.