Le géant français de l’hôtellerie va se doter d’un Comex bis, entièrement composé d’employés de moins de 35 ans.

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 L’idée paraît excellente pour au moins 3 raisons :

  • Bousculer dans les entreprises la promotion “à l’ancienneté” sur le mode “tu seras chef dans 20 ans mon fils”, qui a de quoi en décourager plus d’un.
  • S’inspirer du modèle des start-up, souvent créées et dirigées par des jeunes, modèle qui prouve que “la valeur n’attend pas le nombre des années”.
  • Réduire l’écart entre un discours ambiant, valorisant l’innovation et le changement, et une réalité des entreprises nettement plus conventionnelle, voire passéiste.

L’idée implique cependant d’apporter des réponses à 3 questions au moins :

  • Quel rôle et quelle place donner à ce comex bis ? En l’occurrence, il devra “se réunir avant le comex et formuler ses recommandations”. Autrement dit, le voilà positionné en source de propositions plus que de décisions.
  • Qui choisir pour participer à ce comex bis ? Les trois critères indiqués sont : “jeune” (moins de 35 ans), féminisé (7 femmes et 5 hommes, vs 2 femmes dans le comex actuel) et de pays différents. Reste un critère non évoqué : celui de l’appartenance sociale pourtant fondamental. Car l’identité d’un individu, c’est-à-dire ce qui le constitue dans son identité singulière et sociale,  se construit sur la combinaison de trois paramètres : son âge, son sexe et son appartenance sociale justement.
  • Comment éviter le phénomène de mimétisme ? Car avec les meilleures intentions du monde, “l’évidence” peut conduire à sélectionner de “jeunes potentiels” assez proches en termes de formation, métier, premières étapes du parcours professionnel. Ou bien à oublier combien de grandes entreprises recrutent, par exemple, de jeunes diplômés d’origines variées qui, au bout de quelques mois, entrent dans le “moule” et finissent par ressembler au “modèle” de leur entreprise, voire finissent par se ressembler.

L’article

Il y avait déjà la mode du « reverse mentoring » qui incite les entreprises à stimuler leurs cadres dirigeants en faisant appel à l’expérience de ses jeunes recrues. AccorHotels a décidé d’aller encore plus loin puisque le géant français de l’hôtellerie dirigé par Sébastien Bazin va se doter d’un comité exécutif bis, entièrement composé d’employés de moins de 35 ans. « Ces jeunes auront accès à tous les documents. Ils auront le même niveau d’information que les autres membres du comité. Ils devront se réunir avant nous et formuler leurs recommandations », explique le patron du groupe. Si certains risquent de voir dans cette annonce un coup médiatique ou une ode au « jeunisme », Sébastien Bazin défend son choix en faisant remarquer que la plupart des start-up numériques devenues des géants bouleversant la vie des groupes établis – comme Airbnb par exemple – ont été fondés par des jeunes. « La grande entreprise est pyramidale. Le statut et le pouvoir dépendent de la capacité d’accéder à l’information. Mais l’entreprise de demain ne pourra plus être bâtie sur des rapports de forces mais sur des rapports de flux », a ainsi déclaré le PDG, mercredi, à l’occasion d’un forum sur l’avenir du travail organisé par Stéphane Richard, le PDG d’Orange.

Un conseil plus féminisé

Ce « shadow comité », ou conseil de l’ombre, sera également beaucoup plus féminisé que l’actuel comité exécutif AccorHotels puisqu’il accueillera 7 femmes et 5 hommes, contre seulement deux femmes dans le comex officiel. Il sera aussi bien plus international, puisque ses membres viendront des différents pays dans lesquels l’hôtelier est implanté. « Ils ne seront peut-être pas d’accord avec nous 50 % du temps mais cela devrait être une bouffée d’oxygène », veut croire Sébastien Bazin, lequel précise quand même que l’effort consenti pour mieux valoriser la contribution des jeunes dans l’entreprise ne devra pas donner le sentiment aux cadres de 40-50 ans que le groupe ne compte plus sur eux.

DAVID BARROUX

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