Google a publié le bilan des trois dernières années et dévoile les caractéristiques des demandes de suppressions de liens.

Tout commence par un arrêt. Et pas n’importe lequel, celui de la Cour de justice de l’Union européenne, prononcé le 13 mai 2014, dans lequel l’instance supranationale donne aux Européens le droit de demander leur déréférencement aux exploitants de moteurs de recherche, tels que Google. Autrement dit : le « droit à l’oubli ».

Une condition sine qua non cependant : que les liens mis en cause soient « inadéquats, pas ou plus pertinents, ou excessifs » au regard du critère « d’intérêt général ».

Trois ans après l’entrée en vigueur du « droit à l’oubli », Google a décidé d’en dresser le bilan, le plus exhaustif possible, en recensant le nombre de demandes de suppressions de liens, le taux de suppressions effectives, le profil du demandeur, le contenu des demandes et le type de sites concernés. Parcours en trois questions du précieux « Transparency Report ».

Combien d’URL concernées ?

Le compteur atteint des millions. Soit 2.437.271 liens exactement, qui ont donc fait l’objet d’une demande de suppression des résultats de recherche depuis le 29 mai 2014, indique la firme californienne. Mais ce nombre n’équivaut pas à celui des demandes puisqu’un utilisateur peut exiger le déréférencement de plusieurs URL. Ainsi, derrière ces plus de deux millions de liens se dissimulent en réalité 654.876 demandes.

 La majorité des requérants sont ce que Google appelle des « particuliers », soit 88,7 % du contingent. Dans les 11,3 % restants, on retrouve des entreprises (21 %) et des gouvernements (21 %), mais aussi des mineurs (40 %) et des personnalités publiques non politiques (14 %).

Combien de liens supprimés ?

Toute demande n’aboutit pas forcément. Au total, un peu moins de la moitié des URL ont ainsi été supprimées (43,3 % tous pays confondus), c’est-à-dire 900.665 liens sur les 2,4 millions évoqués précédemment.

Pour expliquer ce ratio, Google précise que chaque demande est examinée au cas par cas, et qu’une série de critères justifie un refus de suppression : « Nous pouvons refuser de supprimer une page si nous estimons qu’elle contient des informations qui relèvent de l’intérêt général », explique l’entreprise dans son rapport, reprenant les termes précis de l’arrêt de la Cour de justice européenne à l’origine du « droit à l’oubli ».

De plus, « le processus d’évaluation est complexe et implique de retenir divers facteurs : contenu en rapport avec l’activité professionnelle, un délit passé, une fonction politique ou un poste public, contenu créé par l’auteur de la demande, contenu reprenant des documents officiels ou contenu de nature journalistique », poursuit Google.

En France, un prêtre condamné pour possession d’images d’abus sexuels sur des enfants a par exemple demandé de retirer des articles portant sur sa peine et son bannissement de l’Eglise. « Nous n’avons pas supprimé les pages correspondantes des résultats de recherche », indique le moteur de recherche.

En revanche, toujours en France, lorsqu’une personne a réclamé la suppression de plusieurs URL portant sur son élection en tant que chef d’un mouvement politique et sur d’autres postes politiques qu’il a occupés alors qu’il était mineur, sa demande a abouti. Google a « supprimé 13 URL, car cette personne n’apparaissait plus engagée dans la vie politique et était mineure à l’époque des faits. »

Quels sont les sites les plus visés ?

L’annuaire 118712.fr, géré par Orange, est le site le plus affecté par la suppression d’URL tous pays confondus. Cette plateforme française a vu 7.701 liens supprimés en trois ans. En seconde place apparaît Facebook, dont 6.846 URL ont été effacées même si les demandes étaient, elles, beaucoup plus nombreuses : 16.623.

La dernière marche du podium est occupée par un autre réseau social, Instagram. D’une manière générale, annuaires et réseaux sociaux de diverses formes concentrent l’essentiel des demandes en Europe.

En France, outre le 118712.fr, Twitter et Facebook, on trouve aussi le site copainsdavant, et l’annuaire téléphonique gepatroj dans les sites les plus visés par les demandes.

HELENE GULLY

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